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Western du grand nord

Bonjour ! Aujourd’hui, je vous conduis dans le grand nord avec ce western dystopique paru aux éditions Zulma le 1er avril.

Au nord du monde, Marcel Theroux

Makepeace vit seule depuis des années aux confins de la Sibérie. Son activité principale, hormis celle de trouver à se nourrir, est de sauver les livres des décombres de la ville qui l’entoure. Un jour, une femme terrifiée débarque dans sa vie. Les quelques mois qu’elle passera avec Ping à ses côtés ainsi que l’incroyable vision d’un avion survolant les terres désertiques pousseront Makepeace à prendre la route. Guidée par l’espoir de ne pas être seule au monde et surtout de retrouver un semblant de civilisation, elle n’hésitera pas à quitter son refuge pour entreprendre un voyage dont elle ne connaît pas la destination finale.

« On l’ignorait au début, quand la première crève-la-faim est tombée raide morte devant l’épicerie, mais apparemment, la moitié de la population mondiale était en marche.

Le temps que j’atteigne mes quatorze ans, notre ville avait presque doublé de taille et les taudis qui s’étaient construits à la périphérie poussaient comme des champignons à cause des nouveaux arrivants qui colportaient leurs histoires d’inondation, de pestilence et de guerre. Notre ville était comme l’épicentre d’un monde en perdition et non un endroit obscur et insignifiant à mille lieues du tourbillon de calamités sur lesquelles nous n’avions pas prise. »

Pour tout vous dire, la motivation principale qui m’a poussée à lire ce récit était la postface de Murakami disant qu’il était mené d’une main de maître. Parce sincèrement, l’idée d’affronter 400 pages avec une protagoniste solitaire au milieu du grand nord ne m’intéressait pas spécialement. Et grand bien m’a pris de ne pas m’arrêter sur mon a priori. J’ai été conquise par l’écriture de Marcel Theroux qui s’est inspiré de ses reportages dans la zone d’exclusion de Tchernobyl pour donner naissance à son univers post-apocalyptique. Je n’ai pas sauté une page ni même un paragraphe – j’ai très peu de patience pour les longues descriptions de la nature – car rien n’est de trop et le paysage lui-même joue un rôle à part entière. A la fois roman d’aventures proche du western et dystopie, Au nord du monde est une invitation à jeter un regard critique sur notre mode de vie d’hyperconsommation et de perte de lien avec la nature et des conséquences désastreuses que cela pourrait avoir. Un véritable coup de cœur pour ce roman aussi riche que dépaysant.

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Mère amère

Je remercie vivement Le Passeur Éditeur pour m’avoir fait parvenir le roman que je vais vous présenter aujourd’hui.

Je n’écrirai que morte, Elisabeth Letourneur

teaserbox_60488890La narratrice et son mari, qui sont déjà parents d’une petite fille, décident d’agrandir la famille en adoptant un petit garçon au Vietnam.

Dès le départ, tout est bien sûr compliqué entre les démarches administratives, les frais multiples, le voyage à l’autre bout du monde et la confrontation avec une culture totalement différente de la notre.

Dès le départ, rien ne va entre la femme et l’enfant qui va lui être confié. Entre elle et celui qui va devenir son fils, par la force des choses.

Le lien, le tissu maternel qui devrait se former ne se fait pas. La narratrice demeure froide, insensible à cet enfant qu’elle est pourtant venant chercher. Pire, cette insensibilité se transforme en colère. Colère impossible à contenir. Colère qui trahit l’impuissance de la narratrice à se sentir mère d’un enfant auquel elle n’a pas donné vie.

Bientôt, arrive un premier geste insensé. Une gifle. Geste qui va se répéter. Trahissant le vide et l’impossibilité de créer ce lien d’amour nécessaire…

Voilà un premier roman coup de poing dérangeant, dont le thème ne manquera pas d’apparaître comme choquant. Une femme bat l’enfant qu’elle adopte. Elle le sait, elle en a conscience, elle essaie d’appeler à l’aide mais rien n’y fait. C’est plus fort qu’elle. Ce thème fort est magistralement servi par un style puissant, une ponctuation parfaitement maîtrisée et de courts chapitres qui traduisent bien la douleur de la narratrice. Un style ciselé que j’apprécie tout particulièrement.

Je ne sais si ce texte est d’inspiration autobiographique, mais l’intensité qui s’en dégage est tellement exceptionnelle que j’imagine – en tant qu’auteur – toute l’énergie qu’a dû employer Elisabeth Letourneur pour accoucher de ce premier roman. Et si le sujet traité n’est pas, a priori, des plus réjouissants, une lueur d’espoir apparaît à la fin, avec le commencement d’un processus  de guérison. Sans contexte mon plus gros coup de cœur de ce premier trimestre 2017, un roman que m’a fait avoir la chair de poule dans le bon sens du terme.

Je ne résiste pas au plaisir de vous faire découvrir toute l’intensité de ce style si particulier :

« Je suis censée t’aimer, moi. Je suis censée venir adopter un enfant et en prendre soin, comme si c’était le mien.

Mais je suis insensée. Je ne le savais pas, avant. Pas avec cette force-là. Je ne suis pas sensée du tout, je m’en aperçoit là-bas, au Vietnam. […]

Je gifle un petit garçon qui ne comprend pas. 

Comment pourrais-je me parler à moi-même ? Evidemment que je ne me dis rien. Que ça ne me dit rien de me dire ça : tu frappes tous les jours l’enfant que tu adoptes.

Comment pourrais-je ?

Je me tais. Imaginez ne plus rien vous dire à vous-même, soudain. C’est un silence de fou qui se fait. Votre tête est insonorisée. Le son est coupé.

C’est mon corps qui fait. Mon corps te donne de petites gifles. Parfois une ou deux plus grosses. Tu ne pleures pas plus fort pour autant. Je ne me dis rien.

Mon cerveau n’entend pas arrête.

Je te dis tais-toi. Ça ne marche pas. »

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Apparences

Désolée de vous avoir laissés plusieurs jours sans nouvelle, mais je viens encore de m’atteler à un pavé. 600 pages de plus au compteur ! Mais quand on aime, on ne compte pas !

Tout pour plaire, Ingrid Desjours

9782266262125Déborah, une magnifique et brillante jeune femme qui ne laisse insensible aucun regard masculin et féminin, est mariée à David, un séducteur hors-pair, macho prétentieux et colérique, qui fait fortune en prodiguant ses conseils pour « serrer » les femmes à coup sûr. Alors qu’ils semblent tous deux former le couple parfait, leur voisine s’inquiète pour Déborah. En effet, outre les cris issus de nombreuses disputes qui se font entendre de plus en plus fréquemment la jeune femme présente de nombreuses marques sur les bras, laissant songer qu’elle est battue et sous l’influence d’un pervers narcissique bien qu’elle nie en bloc les soupçons de violences et affirme aimer son mari plus que tout.

Dans ce contexte de vie de couple tendu, le petit frère de David, Nicolas fait irruption dans leur foyer accompagné de sa fillette de 4 ans, Emma. Nicolas est paniqué. Voilà plusieurs jours que Laura, sa femme, a disparu sans laisser de traces. Pire, il est soupçonné de l’avoir fait disparaître. Il faut dire que son passif de junkie ne plaide pas en sa faveur… Alors que David ne veut absolument pas de son frère chez lui – il lui voue une haine intense et ne l’a pas vu depuis 5 ans -, Déborah insiste pour qu’il reste afin de prendre soin d’Emma qui se retrouve sans maman et avec un père soupçonné de meurtre. Mais la fillette ne semble ne pas être la seule motivation de la jeune femme. Nicolas se révèle en effet encore plus séduisant que son frère… Une cohabitation dangereuse va alors commencer…

Je ne connaissais pas du tout l’auteure, psychologue spécialisée en sexo-criminalité, consultante et scénariste de plusieurs séries pour la télévision française et qui n’en est manifestement pas à son coup d’essai en matière de roman. J’ai donc entamé ma lecture sans a priori, curieuse de découvrir l’univers de cette romancière. Je n’ai pas été déçue et c’est le moins que je puisse dire. Ce thriller psychologique m’a tenue en haleine du début à la fin. Tous les fils sont inextricablement mêlés, aucun détail n’est laissé au hasard. Sans rien dévoiler de l’intrigue, aucun des personnages n’est vraiment ce qu’il fait voir de lui. Dans ce roman, tout n’est qu’apparences et manipulation. L’auteure parvient à savamment suggérer les choses de manière à entraîner le lecteur dans son jeu. Et si j’avoue avoir eu des doutes quant à l’identité du coupable assez rapidement – sans pourtant détenir le mobile -, cela n’a en rien gâché mon plaisir d’observer le tissage complexe de cette toile d’araignée. Un vrai travail d’orfèvre auquel s’ajoute une plume fluide. Les personnages sont tous très travaillés, notamment celui du commandant Sacha Mendel, chargé de l’enquête concernant la disparition de Laura. Une enquête qui va lui demander un bien plus grand investissement qu’il ne l’aurait pensé. Coup de cœur ! A savoir, ce roman est en cours d’adaptation par Arte pour devenir une série TV. J’ai hâte de voir ça !

 

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Embrigadée par Daesh

Merci aux éditions Syros pour l’envoi de ce roman choc en avant-première qui peut et devrait, dans le contexte actuel, être lu par tous.

Et mes yeux se sont fermés, Patrick Bard

9782748520590Maëlle a 16 ans et vit chez sa mère avec sa petite sœur. Avec son père, les relations sont plutôt tendues. Douée dans les matières littéraires, elle ne comprend pas grand chose jusqu’à ce qu’un camarade de classe se charge de l’aider. Rebelle dans l’âme, détestant les injustices, elle rêve de faire de l’humanitaire. Une adolescente apparemment bien dans sa peau, qui n’a pas la langue dans sa poche. Mais peu à peu, la jeune fille va changer…

Maëlle passe en effet de plus en plus de temps sur le net, sur Facebook en particulier où elle passe des journées à discuter avec d’autres jeunes filles. Bientôt, elle modifie sa façon de s’habiller, ne se rend plus en cours de sport, quitte son petit ami… Sans le savoir, elle est en train de tomber dans les mailles du filet des intégristes de Daesh qui lui font miroiter qu’en rejoignant leur groupe, qu’en adoptant leurs règles, qu’en se mariant avec l’un des leurs, elle pourra sauver les enfants syriens du massacre. En quelques semaines, la vie de Maëlle va totalement basculer : l’adolescente décide de changer de prénom et de partir faire le jihad. Dans son entourage, personne n’a rien vu venir ou, plutôt, tous ont refusé de voir et de croire l’impossible…

Autant vous prévenir d’emblée, on ne ressort pas indemne d’une telle lecture et c’est tant mieux. C’est la preuve que l’auteur, Patrick Bard, photojournaliste et grand voyageur, a accompli avec brio l’objectif qu’il s’est fixé. Disséquer, au travers d’un roman, les mécanismes complexes qui peuvent pousser une jeune fille à rejoindre Daesh alors que rien ne la relie de près ou de loin avec les islamistes radicaux. Page après page, on sent que l’auteur a effectué un travail de recherches très poussé. Rien n’est laissé au hasard. De la toile d’araignée qui se tisse via les réseaux sociaux aux des vidéos de propagande ressemblant à des clips musicaux avant les images de décapitations, le romancier décortique avec minutie tout le process qui amènent les jeunes occidentaux à partir en Syrie. C’est d’ailleurs après les attentats de Charlie Hebdo et parce que le fils d’une amie a été embrigadé en quelques semaines que Patrick Bard s’est décidé à écrire sur le sujet. Il a également volontairement choisi un personnage féminin car on ne parle pas souvent des jeunes filles dans les médias alors qu’elles sont nombreuses à partir. Très peu reviennent. Elles ne participent que très rarement aux combats mais vivent dans des conditions effroyables après avoir été mariées et fécondées – je choisis volontairement ce dernier mot – pour assurer la descendance des combattants. Elles sont victimes de manipulations, de rapt mental dignes des plus puissants mouvements sectaires.

Voilà pour ce qui concerne le fond. Pour ce qui est de la forme, là aussi l’auteur frappe fort en choisissant la forme du roman choral qui donne à voir les points de vue de l’entourage de la jeune fille. Chaque chapitre correspond à un personnage. Les plus proches reviennent évidemment plus souvent et évoquent la transformation de Maëlle qui se coupe peu à peu de son environnement. Je trouve que cette technique dramaturgique convient parfaitement pour transcrire à la fois l’évolution de l’adolescente et l’incompréhension et l’impuissance des personnes qui l’entourent. Nul besoin d’en dire plus, je vous laisse découvrir par vous-même ce roman coup de poing. Un vrai coup de cœur. A lire aussi bien par les adolescents que par les adultes. A partir du 25 août dans vos librairies.

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Book power !

Encore un grand merci à celle qui m’a offert ce livre !

La bibliothèque des cœurs cabossés, Katarina Bivald

1507-1Sara, jeune suédoise de 28 ans, qui vient de se faire licencier de la librairie où elle a toujours exercé son métier avec passion, débarque un beau jour à Broken Wheel, une bourgade perdue et dépeuplée de l’Iowa. Elle est censée rejoindre là-bas une vieille dame avec qui elle correspond et échange des livres depuis des années, Amy. Sauf qu’à son arrivée aux Etats-Unis, Amy est morte et Sara arrive précisément chez elle pour ses funérailles. Censée passer deux mois en compagnie de la défunte, la libraire suédoise ne sait trop comment réagir : partir ou rester ? Après quelques jours de réflexions et avoir fait la connaissance de certaines figures incontournables de la ville – étranges mais attachantes – Sara décide de rester. Mais elle tient vraiment à trouver une activité et surtout à remercier les habitants qui s’évertuent à lui rendre tous les services possibles sans jamais lui demander de payer. Bientôt, elle va trouver une idée géniale qui lui permettra d’assouvir sa passion des livres tout en rendant hommage à celle qui aurait dû être son hôtesse et en tentant de redynamiser le village.

Je vous ai présenté il y a quelques semaines le nouveau roman de Katarina Bivald, Le jour où Anita envoya tout balader. Après avoir adoré ce livre, j’avais vraiment envie de découvrir le premier roman qui a fait connaître son auteure et qui est devenu un véritable succès de librairie.

Dans cet ouvrage, l’un des principaux personnage sont les livres. Et ce n’est pas pour rien. Bivald a très longtemps été libraire, et son amour des livres et de son métier transparaît tout au long de ce premier roman. Et pour un coup d’essai, c’est une véritable réussite ! Les personnages – qu’ils soient principaux ou secondaires – sont tous dépeints avec une finesse étonnantes. Si chacun a son propre caractère, les esprits évoluent au fur et à mesure de la progression de l’intrigue, certains allant même agir quasiment à l’encontre de ce qu’ils pensaient être leurs principes fondateurs. Je ne suis pas particulièrement sentimentale et ne me tourne pas habituellement vers des histoires joyeuses mais contre toute attente, ce qui m’a plu dans ce roman, c’est justement qu’il respire le bonheur, la joie de vivre. Sans mièvrerie. En révélant les qualités et les défauts de chacun. En soulignant la nécessité d’écouter son cœur, de croire en ses rêves, de ne jamais y renoncer. De mener le chemin qui nous fait nous sentir bien, quoi que puissent en penser l’entourage. Et le plus important, de prendre confiance en soi. Un gros coup de cœur pour ce roman qui sous son apparente légèreté nous apporte une jolie leçon de vie le tout avec une légère pointe d’humour et d’autodérision.

Petit extrait :

« Elle s’était contentée de la sécurité des rambardes toute sa vie, et pour la première fois, elle était au bord du précipice et tâtonnait à l’aveugle, consciente qu’il existait d’autres manières de vivre bien plus intenses et grandioses.

Elle réagissait devant cette prise de conscience comme elle aurait réagi devant un véritable abîme. Elle éprouvait du vertige et une violente envie de sauter, peu importaient les conséquences. »

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Étrange bibliothèque

Je remercie encore Alexandra qui me connait si bien et m’a encore fait découvrir une magnifique pépite !

Au paradis des manuscrits refusés, Irving Finkel

9782709656221-001-xAu fin fond de la campagne anglaise se cache une bibliothèque pour le moins étrange. Ici, en effet, ne sont répertoriés et mis en rayons que les manuscrits ayant fait l’objet de refus de la part d’éditeurs, accompagnés de leurs missives – parfois violentes – de rejet. Sous l’égide du conservateur en chef, le Dr Montague Patience, une incroyable équipe de bibliothécaires est chargée de veiller à la bonne classification et conservation des différents ouvrages qui parviennent nombreux à la bibliothèque. Et alors que l’on s’attendrait à ce que personne ne soit attiré par ces manuscrits inédits – bien souvent mal écrits – d’auteurs totalement inconnus, il n’en est rien. Notre bande de bibliothécaires va devoir surmonter toute une série de perturbations : consœur américaine plus que pénible, troublante étudiante cachant une actrice aux intentions plus que douteuses, cambrioleurs et j’en passe ! Mais qu’on se le tienne pour dit, Montague et son équipe sont prêts à tout pour défendre les biens qui leur ont été confiés.

Ce roman est tout bonnement un chef-d’oeuvre d’humour anglais ! Chaque page vient révéler des situations plus cocasses les unes que les autres et des personnages hilarants par le sérieux avec lequel ils y font face. On retrouve ici le fameux nonsense carrollien, les bibliothécaires et surtout le conservateur en chef se posant des questions plus qu’absurdes mais hautement existentielles dont les principales sont : « quel était l’intérêt de la Bibliothèque ? A quoi servaient-ils tous ? […] la littérature publiée avait-elle plus de valeur que la littérature impubliée ? ». Evidemment, ce genre de questionnement ne remet absolument pas en cause le travail du Dr Patience ni celui de la trentaine de personnes œuvrant dans cette bibliothèque si singulière. Bien difficile de décrire davantage cet ouvrage tant il réserve de surprises. Je l’ai lu très doucement pour profiter le plus longtemps possible des pépites qu’il réserve, c’est dire ! Il m’a un peu fait penser à La conjuration des imbéciles de Toole que j’avais lu et chroniqué il y a quelques années.On notera un joli pamphlet contre la cruauté du monde éditorial qui viendra réjouir tous les écrivains qui se sont vus refuser un jour ou l’autre leur manuscrit. Gros coup de cœur ! Juste pour le plaisir de vous donner un exemple de l’humour et de l’écriture parfaitement maîtrisée de l’auteur, je cite ici l’une des fameuses lettres de refus adressées par un éditeur à un auteur de manuscrit refusé en devenir :

« Cher monsieur,

En dépit des quarante-sept rudes années que je vient de passer dans l’édition, je ne parviens pas à comprendre comment quelqu’un peut oser écrire un manuscrit tel que celui que vous nous avez envoyé. C’est peu dire que cela relève d’un scandaleux gâchis de papier dactylographié.

Vous êtes, monsieur, un affront vivant à tous les arbres qui poussent sur cette planète ».

Tout le livre est sur ce ton délectable. Si vous avez un livre à lire cette année, ne cherchez plus, c’est celui-ci qu’il vous faut !

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La femme à la moto

Je ne sais plus quels mots employer pour remercier la charmante petite fée qui me couvre de livres…

Le jour où Anita envoya tout balader, Katarina Bivald

product_9782207130476_195x320Anita, 38 ans, mère célibataire, employée dans le supermarché local, voit sa vie s’effondrer le jour où sa fille Emma quitte le foyer pour partir faire ses études à l’université. Effectivement, elle vient de passer les 19 dernières années de sa vie à tout mettre en oeuvre pour l’élever au mieux et là, elle se rend compte du jour au lendemain que sans sa fille, il ne lui reste rien. Dans un premier temps, après avoir compté les jours jusqu’au retour d’Emma et nettoyé de fond en comble son appartement, elle ne sait vraiment pas comment occuper son temps libre. Heureusement, sa meilleure amie Pia et Nesrin, une collègue de l’âge de sa fille, vont l’aider à trouver des idées pour ne plus s’ennuyer. Forcément, elles ne sont pas vraiment au goût d’Anita mais elles ont au moins le mérite de réveiller un vieux rêve d’adolescence : apprendre à faire de la moto. Le jour où Anita se décide à pousser la porte de la moto-école, sa vie va radicalement changer. Encore plus quand elle va rencontrer son moniteur, Lukas aussi séduisant que mystérieux. A côté de ses cours de moto, Anita va se voir confier bien malgré elle l’organisation de la Journée de la Ville, une fête désuète qui n’intéresse personne. Bref, à l’approche de la quarantaine, la célibataire ne va bientôt plus disposer d’un moment à elle. Mais est-elle bien prête à tous ces bouleversements ?

J’ai littéralement dévoré ce roman enjoué qui m’a donné le sourire d’un bout à l’autre. Je n’avais entendu que du bien à propos du premier roman de Bivald La bibliothèque des cœurs cabossés (présent dans ma PAL grâce à ma petite fée, qui fera donc partie de mes lectures estivales), je ne suis absolument pas déçue par celui-ci qui m’a fait passer un doux moment de bonheur littéraire. Si l’ensemble se veut plutôt léger et badin, des questions profondes sont abordées : est-il possible de changer de vie du jour au lendemain ? notre chemin est-il tout tracé ? avons-nous le droit de mettre de la folie dans notre vie quitte à y laisser quelques plumes ? n’est-il pas préférable de rester dans son train-train quotidien par facilité au risque de ne jamais connaître véritablement le bonheur ? Au trois premières questions, ce roman répond par un grand oui contre un énorme non à la dernière. Cette jeune mère saura vous prouver qu’on peut toujours choisir de changer notre vie, à n’importe quel âge, quelque soit les risques à prendre. Parce que le plus gros des riques n’est-il pas de passer le restant de ses jours à s’ennuyer par confort ? Un livre qui me parle forcément particulièrement en ce moment pour ceux qui me connaissent. Je vous conseille donc fortement ce livre qui éclaircira votre été. Tous les personnages principaux comme secondaires sont parfaitement dépeints, les dialogues s’enchaînent avec justesse et humour de sorte qu’on ne voit absolument pas le temps passé. Coup de cœur !

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Amour toujours

Je remercie une nouvelle fois très chaleureusement l’amie qui m’a offert ce livre.

Les oubliés du dimanche, Valérie Perrin

9782226317155-jJustine, 21 ans, est aide-soignante aux Hortensias, la maison de retraite de la petite ville de Bourgogne où elle a été élevée, avec son cousin Jules, par ses grands-parents. Les parents (leurs pères étaient jumeaux) de Justine et Jules sont décédés dans un accident de voiture alors que les cousins étaient en bas-âges.

Justine aime son métier et la compagnie des personnes âgées, peut-être parce qu’elle a grandi chez son pépé et sa mémé. Aux Hortensias, une patiente occupe davantage son attention que les autres. Il s’agit d’Hélène Hel, une ancienne couturière devenue patronne de bistrot, qui avait toujours rêvé d’apprendre à lire. Justine a décidé d’écrire la vie de la vieille dame dans un cahier afin que son petit fils Roman – dont la jeune femme est secrètement amoureuse – puisse mieux connaître la vie fascinante de sa grand-mère.

Dans le même temps, un étrange corbeau sévit à la maison de retraite. Des appels anonymes sont passés depuis la chambre d’un patient. L’auteur de ces coups de fil appelle les familles des personnes qui ne reçoivent jamais de visite pour leur faire part du décès de leur aïeul. Evidemment, personne n’est mort mais les familles viennent au grand complet à la maison de retraite pensant faire leurs adieux. La surprise est grande des deux côtés à l’arrivée : pour les enfants qui n’y comprennent rien et surtout pour les personnes âgées, ravies de ces visites inattendues.

Encore un roman que j’ai adoré ! Pourtant, l’idée de me retrouver plongée dans une maison de retraite pendant 400 pages n’avait pas spécialement de quoi m’enchanter. Et pourtant, j’ai véritablement été absorbée par ce roman très bien construit, qui mêle trois intrigues qui s’entrecroisent. Le récit enchâssé de la vie d’Hélène vient très opportunément s’intercaler dans l’histoire principale et conduit le lecteur avant et après guerre dans une histoire d’amour passionnante (et pourtant, je ne suis pas particulièrement fan du genre !). Quant au récit cadre, le mystère du corbeau va entraîner Justine bien au-delà de qu’elle aurait pu imaginer puisqu’elle va remonter jusqu’au décès accidentel de ses parents et lever le voile sur un secret de famille plus que glaçant. En outre, tout en se plongeant dans l’histoire de la vieille dame, la jeune aide-soignante va peu à peu se découvrir et s’interroger sur le sens qu’elle veut donner à sa vie.

Je ne me suis pas ennuyée un seul instant avec ce roman subtile, traitant d’un sujet pourtant pas très attirant de prime abord. Les personnages sont très bien dépeints et gagnent en épaisseur et en complexité à mesure que l’on avance. A aucun moment l’intrigue ne tombe dans le sentimentalisme et c’est ce qui fait la force et le charme de ce roman d’amours complexes, que ce soit au passé comme au présent. A découvrir ! Coup de cœur !

 

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Premier roman

Je remercie les éditions Syros qui me font une nouvelle fois découvrir un excellent roman jeunesse.

Comment j’ai écrit un roman sans m’en apercevoir, Annet Huizing

003914853La mère de Katinka est décédée brutalement alors que celle-ci n’était qu’une toute petite fille. Avec son frère Kalle, ils ont été élevés avec amour par leur père tout en devant parfois se débrouiller seuls.

Katinka a désormais 13 ans et elle est passionnée d’écriture. La jeune adolescente est impressionnée par sa voisine Lidwine, une romancière de renom qui donne des cours d’écriture. Prenant son courage à deux mains, Katinka va aller lui demander de l’aide pour écrire son propre roman. Le problème, c’est qu’elle ne sait même pas quoi raconter ni par où commencer. Au fil des textes que va écrire la jeune fille et des corrections apportées par l’écrivain, un lien profond va se tisser entre ces deux êtres dont l’un pourrait être la grand-mère de l’autre. Et au fur et à mesure de leurs conversations et des conseils prodigués par l’auteur, le roman va s’écrire sous nos yeux, comme par enchantement.

En arrivant à la fin de la lecture de ce roman, on comprend tout de suite pourquoi il et devenu en seulement un an un best-seller de la littérature jeunesse au Pays-bas. L’amitié naissante entre deux personnages si différents, l’adolescente peu épargnée par la vie qui raconte néanmoins avec humour son quotidien entourée par son frère et son père bedonnant en train de tomber amoureux, et surtout cette merveilleuse idée de composer un récit en intégrant sa critique, ses ratures et ses corrections font de ce livre une petite pépite que l’on a du mal à lâcher avant la fin. Car outre les thèmes abordés, c’est surtout le style qui est ici à saluer : au fur et à mesure de l’écriture, grâce à l’aide de la romancière qui lui apporte de nombreux conseils et grâce à son regard de plus en plus critique sur ses écrit, Annet Huizing, par le biais de sa narratrice Katinka, nous livre les secrets nécessaire à l’écriture d’un bon roman. Et le résultat est sans appel, c’est une vraie réussite ! Encore un coup de cœur !

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Coup double

Je remercie Alexandra de France Loisirs pour sa confiance et m’avoir fait découvrir ce nouvel auteur.

Je reviendrai sur tes pas, Liam McAllister

je-reviendrai-sur-tes-pasA Londres, une série de meurtres sans lien apparent les uns avec les autres, si ce n’est le mode opératoire, laisse à penser qu’un dangereux tueur en série rôde dans les parages. Comment l’auteur de ces horreurs choisit-il ses victimes et pourquoi réalise-t-il de telles mises en scène ? Voilà les questions auxquelles devront répondre l’inspecteur Martin Peterson et sa jeune collaboratrice Kate Mulligan s’ils veulent mettre un terme à cette suite macabre. Mais entre le flic expérimenté et fort en gueule et sa mystérieuse collègue, les débuts sont un peu compliqués, ce qui ne va pas aider l’enquête.

Difficile d’évoquer l’intrigue d’un thriller sans en révéler plus qu’il n’en faut et vendre la mèche, voilà pourquoi j’arrête ici mon résumé. Très bonne surprise que ce roman pour l’amatrice du genre que je suis. Je l’ai littéralement dévoré ! Il faut dire que dès la première page, Liam McAllister nous plonge au cœur du suspens en mettant en scène un premier meurtre en direct (qui se révélera être le troisième en fait). Dès lors, nous connaissons le criminel et son mode opératoire et sommes en cela en avance sur les enquêteurs. Mais bientôt, les pistes vont s’emmêler et le véritable psychopathe n’est peut-être pas celui que l’on pense (ça aussi, le lecteur le découvrira bien avant Martin et Kate). Toutefois, ce n’est pas pour autant que nous sommes au courant de tous les tenants et aboutissants de l’enquête. Loin de là. Et c’est ici que l’auteur possède un réel art de la narration. Cette narration interne qui alterne entre tous les protagonistes et qui finit par réaliser un kaléidoscope narratif qui ne nous laisse apparaître que quelques parcelles de la solution sans nous la révéler dans son ensemble. A nous comme aux enquêteurs de tenter de reformer le puzzle afin de comprendre les vraies motivations du coupable. Et plus l’intrigue progressent, plus les fils s’emmêlent, formant un tissu complexe qui va toucher de près, voire de très près un personnage auquel nous nous sommes attachés. Vous l’aurez compris, je ne me suis pas ennuyée une seconde en lisant ce polar psychologique et tout laisse à croire que nous pourrions retrouver notre couple d’enquêteurs dans d’autres livres car leur relation demanderait à être développée. Auteur à suivre donc… Coup de cœur !